La haie et le bocage dans la Vienne

    Le bocage est un type de paysage, associant haies, prairies et parcelles cultivées, mais c’est avant tout un mode de valorisation de l’espace rural et agricole, historiquement très ancien. Au fil du temps, le bocage, constitué par l’homme, a servi à clore les parcelles, protéger les cultures, fournir du bois de chauffage et du bois d’œuvre. Il constitue un mode durable d’exploitation du sol. Le «  climax  » bocager met un siècle à se constituer. L’écoulement des eaux et le climat y sont régulés. Malgré l’impression de stabilité et de permanence qu’il procure, c’est une formation très évolutive.

    Des paysages bocagers variés

    Haies hautes, haies basses

    Les haies ont diverses formes, allant de la haie haute, à la haie basse ponctuée d’arbres isolés, voire à la haie basse seule ou au contraire à des lignes d’arbres sans strate arbustive.

    Les haies ont plusieurs strates et une hauteur variable de 1 à 12 mètres. La haie ouvre ou ferme le paysage, le point de vue, selon la façon dont elle est conduite. Ainsi dans le paysage alternent des routes et des chemins aux ambiances contrastées: tantôt couloir enserré entre deux haies hautes, puis en balcon avec une haie basse laissant découvrir le paysage en contre-bas.

    Les haies bocagères associent de nombreuses espèces : châtaigniers, chênes, frênes, charmes, érables champêtres, noisetiers, arbustes à baies… Le chêne et le châtaignier dominent dans la composition, mais aussi par leurs hautes silhouettes de l’âge adulte.

    Bocage, semi-bocage, bocage résiduel

    Les densités de haies très diverses selon les territoires, génèrent une palette de paysages bocagers variée, allant de paysages bocagers denses comme dans le Montmorillonnais ou les franges de la Gâtine, à des paysages semi-bocagers dans certaines parties des Terres Rouges Bocagères ou des Terres de Brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) et jusqu’à des secteurs de bocage résiduel lorsque les lambeaux de haies ne sont plus que des ponctuations arborées au sein des grandes cultures.

    Un maillage de haie en régression

    A gauche la carte révèle un maillage bocager dense dans les années 1950/65. Les parcelles sont de petite taille entre 1 ha et 10 ha pour les plus grandes. Les routes et les chemins sont bordés de haies. A droite, en 2020 le réseau de haies a considérablement régressé. Il ne forme plus un maillage mais est constitué de lambeaux de haies discontinus, les arbres et les haies se faisant rares par endroit. La taille de parcelles est passée de 6 ha à 25 ha pour les plus vastes.

    De façon générale dans la Vienne, on observe une régression du maillage bocager, liée au recul de l’élevage et des prairies, à l’agrandissement des parcelles et au basculement de certains secteurs vers la culture céréalière intensive. La diminution du linéaire de haies a ainsi été estimée à 34% en 40 ans dans le Montmorillonnais et à 67% dans les Terres Rouges Bocagères  (Source : Les cahiers du patrimoine naturel, 2012).

    Un peu partout, le maillage bocager se disloque, perdant progressivement de sa cohérence, avec de grandes variations de gestion d’une exploitation à une autre. Certains secteurs se sont ouverts progressivement et n’accueillent aujourd’hui que quelques linéaires de haies relictuels, dont certaines sont réduites à quelques arbres isolés.

    La haie, un élément de l’économie agricole

    Le bocage est historiquement lié à l’élevage. La haie permet d’abord de clore les parcelles, qu’il s’agisse de maintenir les animaux dans leur pré ou de protéger les cultures de la dent du bétail.

    La haie offrait également de multiples services à l’économie agricole et rurale : complément fourrager pour les bêtes, bois de feu, bois d’œuvre, petits fruits…

    Aujourd’hui, même dans un contexte de diminution de l’élevage et de mise en culture des sols, la haie présente toujours un atout pour l’agriculture : brise-vent, diminution de l’évapotranspiration des cultures, meilleure infiltration de l’eau dans le sol, diminution de l’érosion superficielle, corridor écologique pour les auxiliaires des cultures… Le développement actuel des filières bois-énergie redonne également une valeur économique au bois de la haie, à condition toutefois d’avoir des prélèvements modérés qui ne compromettent pas le maintien du maillage bocager.

    Des politiques de replantation

    Face à la régression du maillage de haies, de nombreuses politiques de plantation se sont mises en place dans le département. Les programmes allient plusieurs acteurs qu’ils soient financeurs ou maîtres d’œuvre des plantations : agriculteurs, collectivités, associations de chasse, agence de l’eau… Dans son Plan arbres, le département de la Vienne a mis en place des aides spécifiques pour la plantation et la restauration de haies.

    Sources

    • Les Cahiers du patrimoine naturel- Le Pays montmorillonnais. Vienne Nature, Ligue pour la Protection des Oiseaux de la Vienne, 2012
    • Les cahiers du patrimoine naturel – Le Pays Civraisien. Vienne Nature, Ligue pour la Protection des Oiseaux de la Vienne, 2012
    • Les cahiers du patrimoine naturel – Le Pays des Six Vallées. Vienne Nature, Ligue pour la Protection des Oiseaux de la Vienne, 2012
    • De la haie aux bocages. Organisation, dynamique et gestion. INRA, 2003