Roches et construction

Les matériaux utilisés pour les bâtiments étant majoritairement prélevés ou élaborés à proximité des lieux d’utilisation, les ambiances urbaines, en partie dues à l’aspect des murs, sont ainsi influencées par la composition du sous-sol local.

    Tandis que les paysages du département sont largement influencés par les couches géologiques superficielles (fin du Tertiaire et Quaternaire), les murs des villes révèlent les roches plus anciennes, généralement plus massives, comme les calcaires jurassiques, qui ont été principalement exploitées pour la construction.

    C’est ainsi que ces calcaires ont fourni le plus grand nombre de pierres de tailles et moellons observables dans la Vienne. Mais les marges du département, granitiques ou crayeuses, sont également bien présentes sur les façades ou les murs de clôtures.

    En outre, la roche s’expose directement dans le nord du département (Loudunais, Châtelleraudais, vallée de la Creuse) sous forme d’habitat troglodytique.

    Quant aux couches géologiques altérées de surface, leurs argiles ont également été exploitées dans des briqueteries et tuileries.

    De nombreuses carrières aujourd’hui abandonnées

    Des nombreuses carrières qui ont été ouvertes dans le département, sous terre ou à ciel ouvert, très peu sont encore aujourd’hui en exploitation. La plupart ont fermé dans la deuxième moitié du XXe siècle et ce sont dorénavant les sables extraits des terrasses alluviales qui contribuent, de manière bien plus indistincte, à la formation des murs en béton.

    Le plus grand nombre se situe dans le Montmorillonnais, les vallées, en particulier celles de la Vienne et du Clain, et les Terres de Brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) situées entre ces deux vallées. En revanche les exploitations furent peu nombreuses sur les plateaux du Loudunais et de l’ouest du Châtelleraudais, les Terres rouges bocagères, et le nord des Terres de Brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.).

    Principales pierres de la Vienne

    Du calcaire surtout mais avec des nuances

    Masqués par les dépôts continentaux du Tertiaire et du Quaternaire mais affleurant dans les vallées, les couches calcaires du Jurassique ont fourni la majorité des pierres, moellons ou pierres de taille, utilisées pour la construction. Les pierres de taille ont surtout été extraites dans le nord du département tandis que les moellons ont une répartition plus homogène.

    Ce sont surtout les étages du Jurassique moyen ou supérieur qui ont fourni le gros des matériaux de construction traditionnels du département.

    Les blocs calcaires du Jurassique moyen (Bajocien , Bathonien, Callovien), parfois à silex, souvent à grains fins homogènes (oolithiques) ont été prélevés dans les vallées avec d’autant plus d’intensité que les villes étaient proches : Vendelogne, Auxance… Pierres de taille de Chiré-en-Montreuil, pierres réputées de Chauvigny ou des Lourdines (Bonnillet) exportées bien au-delà du département pour leur finesse et leurs qualités monumentales. Des moellons plus ordinaires ont été largement prélevés pour la construction de Poitiers dans différentes carrières situées dans la ville-même ou à proximité, dans les falaises du Clain.

    Ce sont encore les calcaires à pâte fine du Bathonien ou du Callovien qui furent extraits des vallées de la Clouère, du Clain, de la Vienne mais aussi dans le sud du département fournissant moellons et pierre des tailles ou la « pierre à grains » comme à Lavoux.

    Des bancs moins épais du Jurassique supérieur (Oxfordien) sont surtout extraits des moellons (vallée de la Palu, environs de Bonneuil-Matours), mais également les calcaires à coraux qui furent abondamment prélevés depuis l’antiquité aux abords d’Angles-sur-l’Anglin et Saint-Pierre-de-Maillé.

    Par endroit, ces faciès dominants sont supplantés par des variantes issues d’autres étages géologiques, comme dans la haute vallée du Clain, près de Mauprévoir, où les calcaires grenus et fossilifères du Jurassique inférieur (Pliensbachien) ont servi à la construction locale.

    Aux limites des Terres Rouges à châtaigniers, vers Saint-Sauvant, tous les étages jurassiques ont fourni des calcaires durs qui ont été exploités pour la construction. Une bonne partie de l’extraction a été effectuée à partir des vallées :  Bouleure, Clain (La Millière)…

    Dans le Crétacé inférieur de la périphérie du Châtelleraudais, des calcarénites (sortes de grès issus de calcaires) prennent le relais du calcaire. Bien que plus rares, des grès issus des mêmes étages (Cénomanien) ont été extraits à Naintré. Quelques carrières de grès ont également exploité les formations tertiaires (éocènes-oligocènes) à proximité de la Brenne.

    Sur les plateaux des Terres de Brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.), les affleurements de calcaires tertiaires lacustres, comme ceux de Pleumartin, ont également été utilisés pour la construction.

    Au nord, le tuffeau(Craie poreuse à grain fin. Le terme peut désigner la roche, la pierre de construction, parfois le sol)

     

    La craie du Crétacé, et plus particulièrement celle du Turonien, nommée Tuffeau(Craie poreuse à grain fin. Le terme peut désigner la roche, la pierre de construction, parfois le sol), a été très utilisée en particulier au XIXe siècle, principalement dans les communes proches de la vallée de la Loire dont cette roche est emblématique. Disponible sur de grandes épaisseurs (jusqu’à plusieurs dizaines de mètres) le tuffeau(Craie poreuse à grain fin. Le terme peut désigner la roche, la pierre de construction, parfois le sol) a été extrait dans de nombreuses carrières du Châtelleraudais et du Loudunais. Nombre de ces carrières ont ensuite été reconverties en champignonnières avant d’être abandonnées à la fin du XXe siècle.

    Roche tendre à grain fin, réputée pour sa facilité à être travaillée, elle a l’avantage de durcir en vieillissant.

    Privilégié pour les linteaux et encadrements, le tuffeau(Craie poreuse à grain fin. Le terme peut désigner la roche, la pierre de construction, parfois le sol) est souvent associé à des moellons calcaires, ou à la « galuche », pierre calcaire plate extraite des bancs jurassiques du Loudunais comme ceux des affleurements oxfordiens des environs de Sammarçolles.

    Granits et autres pierres issues des massifs cristallins

    Pratiquement toutes les roches du socle cristallin furent utilisées, au moins localement, dans l’habitat ancien.

    Dans le Montmorillonnais, les roches cristallines ont été exploitées en bordure de département, sur les affleurements de plateau, mais aussi vers l’intérieur à partir des vallées, en descendant la Grande Blourde vers Persac, la Gartempe vers Saulgé, la Vienne à Port-de-Piles où la granodiorite rouge nommée «  rouge de Vienne  » a été utilisée comme pierre ornementale.

    Entre l'Isle-Jourdain et Availles-Limouzine, les filons de microgranite ont produit des moellons ainsi que des linteaux.

    À Smarves, le horst de Ligugé a permis de prélever des leucogranites qui ont surtout été utilisés pour réaliser des pavés.

    Aux abords du Montmorillonnais, nombre de murs associent moellons granitiques et calcaires.

    L’Habitat troglodytique

    L’habitat troglodytique est uniquement présent dans la moitié nord du département, creusé autant dans les étages du Jurassique que dans ceux du Crétacé. Ces excavations sont assez nombreuses aux alentours de Poitiers, Jaunay-Marigny, Dangé-Saint-Romain, Loudun, Saint-Rémy-sur-Creuse. Il s’agit en général d’extensions d’habitations, de garages, de remises de petites dimensions.

    Autres variantes géologiques locales utilisées pour la construction

    En dehors des matériaux dominants bien typés, le bâti témoigne des variations locales du substrat :

    • « Pierres rousses » et calcaire jaune Nankin (colorés par le fer issu des sables cénomaniens), ou les « pierres froides » riches en dolomie sont bien présentes vers la haute vallée du Clain où elles concurrencent ou accompagnent les granits.
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    • Les argiles issues des altérations de surface des Terres de Brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) associées aux marnes ont été utilisées dans diverses tuileries ou briqueteries : Saint-Rémy-sur Creuse, Nouaillé-Maupertuis, Champagné-Saint-Hilaire, plusieurs autour de Gençay, près de Moulismes (La Porcelaine, Maison Celle), etc. En dehors des tuiles, plates ou romaines, largement utilisées, la couleur rouge des briques agrémente les ouvertures de certaines maisons ou immeubles sur tout le territoire. 
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    • Plus rarement, sur les plateaux dépourvus de carrières de moellons, des argiles post-oligocènes ont servi à la construction d'habitations très anciennes, construites en fragments de brande (grande bruyère) cimentés par un torchis argilo-sableux.
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    • Des Travertins (calcaires irréguliers), comme ceux de la Fontaine des Tufs au sud de Poitiers ont également été utilisés.
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    • Citons enfin les fermes du hameau du Bouchet, situé sur le plateau au nord-ouest d’Availles-Limouzine, faites avec un grès rouge qui affleure localement.
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    Sources

    • Notices des cartes géologiques au 1/50 000, BRGM
    • D. Dessandier et al., Carrières de France – Roches ornementales et de construction. Exploitations actives à fin 2015, BRGM, SNROC, CTMNC, SIM, 2016
    • D. Dugrillon et al., Inventaire départemental des cavités souterraines (hors mines) de la Vienne, BRGM, 2010