Les brandes du Poitou

    Rédaction : Conservatoire d'Espaces Naturels de Nouvelle Aquitaine

    Contexte départemental

    Dans les paysages de la Vienne, communément appelée « brande », la lande correspond à des portions de territoires au relief peu marqué, aux terres réputées incultes, où d’anciennes forêts furent volontairement déboisées par l’homme. Pendant plusieurs siècles, ces espaces furent maintenus ouverts par l’usage du feu (brûlis) et la mise en pâturage, puis progressivement remplacés par la fauche. La végétation qui s’y développe se compose majoritairement d’arbrisseaux et de sous-arbrisseaux persistants et parfois de quelques arbres.

    En Vienne, les landes couvraient 90 000 hectares en 1860, contre seulement 5 000 de nos jours. Ces derniers bastions se répartissent en une dizaine de grands ensembles de plus de 100 hectares et une centaine de petits sites épars. Cette distribution explique en partie leur persistance comme composante des paysages départementaux.

    Dans le département, les brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) sont le plus souvent associées à un habitat naturel emblématique du Poitou correspondant à des landes mésophiles sur sol pauvre, acide et très sec en été. Ce type de lande se caractérise par la présence de la Brande ou Bruyère à balai (Erica scoparia), la Bruyère à quatre angles (Erica tetralix), la Bruyère cendrée (Erica cinerea), associées à la Molinie (Molinia cærulea) et aux ajoncs. 

    Toutefois, la lande revêt de multiples visages en fonction du sol, de sa capacité à stocker l’eau, des autres milieux qui la bordent ainsi que des pratiques locales, autant de facteurs décisifs d’évolution. Ainsi, les landes du nord Loudunais (1), du Pinail (2), du Lussacois (3) ou du Montmorillonnais (4) révèlent une histoire et des évolutions parfois contrastées.

    Courte histoire des brandes avec l’exemple du sud de la Vienne

    Autrefois, la paysannerie mettait le feu aux brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) pour y faire paître les animaux domestiques sur les deux voire trois premières années. Pendant les quinze à vingt ans qui suivaient, la brande était exploitée pour réaliser des drains semi-enterrés, des toitures, des haies de contention, pour chauffer les fours à pains avant de réitérer ce cycle d’exploitation agricole (feu/pâture/coupe). Cette gestion a duré plusieurs siècles.

    Le passage du système féodal au métayage, puis au XVIe siècle, l'essor des forges à minerai de fer ont impacté sensiblement le paysage. La forêt y fut abondamment exploitée, pour satisfaire en combustible l'activité métallurgique en Montmorillonnais ou ailleurs, pour permettre l'extraction des pierres meulières, convoitées pour la fabrication de la farine. A cette époque, les brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) occupaient les deux-tiers du département.

    Au XIXe siècle, la révolution agricole poursuit la transformation des paysages départementaux. L’agrandissement des surfaces cultivables et le développement de l’élevage ovin de plein air sonnent le recul des superficies de brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) sur ces terres encore difficiles à cultiver de nos jours.

    La brande fut longtemps symbole de pauvreté et de danger. Outre les difficultés jadis à produire des céréales vivrières, la présence du loup a terrorisé les habitants jusqu'au début du XXe siècle, en particulier en Bocage Montmorillonnais où les fermes et les hameaux étaient très dispersés.

    A partir du milieu du XXe siècle, à l’instar de la tendance nationale, l’intensification des pratiques agricoles, l’agrandissement des parcelles et de nombreux projets d’enrésinement réduisent encore les surfaces de brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.).

    La brande, une composante paysagère devenue discrète dans le grand paysage

    Perçue aujourd'hui comme sporadique, la brande apparaît le plus souvent au contact des bois et forêts, se satisfaisant tout autant d'un sol sec, acide et pauvre en nutriments. Sa répartition est étroitement liée à la fréquence des boisements rencontrés sur le territoire.

    En secteur cultivé, au bocage plus ou moins lâche, la brande morcelée occupe principalement le sous-étage des bois, et encore plus discrètement les haies ou les parcelles difficiles d'accès.

    En somme, sans trame paysagère ni points d’observation évidents, le paysage qui se pare de brande demeure discret en Vienne.

    Rattachée aux milieux pionniers, la brande s'implante sur des secteurs ouverts. L'absence d'intervention de gestion mène naturellement et rapidement au fourré, relayé progressivement par la croissance des arbres, avant de constituer un boisement ou une forêt de feuillus.   

    Dans les secteurs où elle est encore présente, les mises en cultures banalisent la diversité paysagère locale et les plantations de parcelles en résineux participent à la fermeture du paysage.

    Une biodiversité et une valeur paysagère aujourd’hui reconnue

    Dans les rares, mais parfois vastes étendues, l'immersion dans la brande est progressive. Hors des routes ou des zones de pare-feu, les marcheurs empruntent un étroit chemin, aussi appelé « layon », propice à la rencontre du chevreuil et du sanglier. Sous l’effet d’une gestion différenciée favorable à une diversification de l’âge de la végétation, certains secteurs paraissent tantôt pastoraux, tantôt sauvages ou tantôt forestiers.

    Les limites sont le plus souvent assez franches mais Dame Nature reprend ses droits de toute part. Là, un jeune chêne s’avance dans la brande, tel un gardien bienveillant. Ici, une ceinture de saules masque une petite mare perdue dans un couvert buissonnant de jeunes bruyères. Ailleurs, la Bruyère à balai et son cortège s’érigent pour former un labyrinthe végétal avant d’accéder aux berges dégagées d’un étang bordé de joncs et de carex, sous les ballets colorés des libellules.

    Au rythme des saisons, la brande expose le jaune hivernal des Ajoncs, le rose tendre de la Bruyère à quatre angles, puis le rose soutenu des Bruyères cendrées en été. Les brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) sont riches d'une palette colorée et changeante.

    L’originalité des brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) de la Vienne et en particulier en Bocage Montmorillonnais tient aussi à la mosaïque d'habitats qui l’accompagnent. En effet, mares, étangs, prairies bocagères, bois et cultures forment au gré des configurations, une grande richesse d’ambiances paysagères. Dans ce contexte singulier, un vaste massif de brande sur près de 900 hectares d'un seul tenant se distingue au sein des paysages du Bocage Montmorillonnais, animé par une faune et une flore remarquables qui ont rendu possible son intégration au sein du réseau de sites naturels européens Natura 2000 sous le nom des « Brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) de Montmorillon ».

    Ces brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) cachent des petits trésors botaniques tels que le Glaïeul d’Illyrie, la Phalangère à fleur de Lys, la Grassette du Portugal… Mais les brandes(Les brandes désignent une lande à bruyère à balais où se mêlent plusieurs espèces de bruyères, des ajoncs, des genêts, des fougères et des graminées. Il s'agit d'une lande de déforestation, qui se développe sur des sols pauvres.) sont aussi le royaume de nombreux oiseaux parmi lesquels : la Fauvette pitchou, le Circaète Jean-le-Blanc, les Busards cendrés et Saint-Martin.