Paysages urbains de la Vallée du Clain

Dans la vallée amont du Clain, les communes ont conservé un caractère villageois même dans les bourgs développés, tandis qu’en aval les villes se sont étendues et transformées.

    Dans ce paysage de vallée, ce paragraphe sur les paysages bâtis concerne des communes intimement liées à la rivière, pour autant le Clain n’est pas toujours « au-devant de la scène ». Une première distinction peut se faire entre les bourgs et villages au sud de Poitiers et les communes au nord. Au sud les agglomérations ont conservé un caractère villageois même dans les bourgs développés, tandis qu’au nord de Poitiers, les mutations ont été profondes et les villes se sont étendues et transformées.

    Le premier facteur qui intervient pour varier les physionomies et les ambiances des villages correspond à l’implantation topographique de chacun d’entre eux dans le profil en travers de la vallée. Dans la partie amont, il y a des situations de balcon où le village s’est positionné en rebord de relief et domine la rivière, comme à Joussé ou à Château-Garnier, ou bien des constructions sur versant, comme Anché ou Sommières-du-Clain. On compte aussi les situations de confluence, qui ont attiré les implantations comme à Voulon, où se rejoignent la Dive et la Bouleure avant de se jeter dans le Clain, à Vivonne, confluences successives de la Vonne, du Palais avec le Clain, à St-Benoît avec le Miosson, et bien sûr à Poitiers avec la Boivre. Souvent le noyau d’origine est implanté en rive de l’affluent plutôt que du Clain. On rencontre également des implantations en vallée, comme Chasseneuil-du-Poitou en rive gauche ou Dissay qui se tient à distance de la berge.

    Le second facteur qui différencie ces paysages bâtis de la vallée repose sur la proximité de Poitiers et des grands axes de communication, qui l’un et l’autre ont induit des développements importants, avec de grands volumes et des architectures nouvelles comme le Futuroscope et les quartiers avoisinants, mais aussi des quartiers résidentiels plus classiques. Ces infrastructures ont également favorisé des multipolarités, d’un côté de la voie, le noyau ancien, de l’autre, le secteur d’activités commerciales et les extensions résidentielles. Dans ce tissu urbain dense et complexe, le Clain n’est pas très perceptible et devient souvent difficile d’accès.

    Le résultat de la conjugaison de ces deux facteurs, la topographie et l’influence de l’agglomération, est illustré par la mise en parallèle du cadastre ancien et de la photographie aérienne.

    Poitiers et ses rivières

    Dans ce paragraphe sur les paysages bâtis de la vallée du Clain, Poitiers est abordé au même titre que les autres communes, sans les développements à la mesure de cette ancienne capitale de région, ville historique riche d’un patrimoine architectural remarquable. L’angle de vue retenu se concentre sur le site géographique de cette ville entre Boivre et Clain, dimension extrêmement sensible qui contribue amplement à la qualité paysagère de Poitiers. Grâce aux rivières, « la nature est en ville », tant pour le cortège de jardins qu’elles entraînent dans leur sillon, surtout le Clain, que pour la topographie de leurs vallées qui mettent en évidence le plateau de la ville. Cette position élevée offre un horizon, des points de vue étendus, dont certains portent sur les extensions de la ville et d’autres sur des versants boisés des vallées amont. Dans cette configuration générale, le parc de Blossac, dont la planéité provient des anciennes fortifications, est une sorte d’angle dur du plateau, il constitue un balcon à l’échelle du grand paysage.

    Rapidement après son entrée dans la commune, la Boivre est phagocytée par les installations ferroviaires. Dans cette vallée, c’est surtout la topographie qui génère un paysage bâti intéressant, par l’échelonnement des maisons et immeubles dans les pentes, les jeux de soutènements, et une présence de jardins sur versant. La vallée du Clain est plus large, elle laisse place à des jardins qui peuvent absorber les crues. Elle présente également des affleurements rocheux, particulièrement après la confluence qui sont autant de marques du socle originel. Comme dans la vallée de son affluent, les versants sont l’occasion d’architectures intéressantes qui doivent s’adapter à la pente. Si la rive gauche, est très urbaine,  la rive droite est moins densément bâtie.

    Une ville de confluence, Vivonne

    Trois rivières irriguent Vivonne, chacune à sa manière. La ville s’est établie en rive gauche de la Vonne mais elle est aussi traversée par le Palais qui rejoint le Clain légèrement à l’aval de la confluence avec la Vonne. Canalisé dans sa traversée de la ville, le Palais n’est pas très visible, par contre il se laisse approcher dans la séquence amont où il irrigue des jardins potagers, en bordure nord du centre-ville. Cette présence des cours d’eau confère une grande variété d’ambiances, les abords de la Vonne étant plutôt bâtis tandis que ceux du Clain restent très naturels. Si, entre la Vonne et le Palais, le site reste assez plat, dès les cours d’eau franchis, le relief se fait sentir, les rues prennent une pente marquée et des escaliers relient même la partie haute de la ville, le quartier de l’ancien château avec la partie basse, autour de la mairie, de l’église et des commerces. Comme souvent, les extensions ont privilégié les emplacements de moindre contrainte, sur le haut de plateau. La RN10 tangente la ville sur sa limite ouest.

    Une ville éclatée, Beaumont-St-Cyr

    La construction et le développement des infrastructures qui empruntent des trajectoires parallèles, fragmentent le territoire et constituent des césures fortes. Les communes de la rive gauche à l’aval de Poitiers, longées à l’est par la nationale N10 qui les coupent de la rivière et à l’ouest par l’autoroute A 10 sont particulièrement concernées. Ainsi, Beaumont et Naintré ressemblent à des iles, non pas cernées par des bras d’eau mais par des voies. Sur dix kilomètres d’autoroute entre St-Léger-la-Pallu et l’échangeur au nord de Naintré, il y a neuf points de franchissement, passages inférieurs ou supérieurs pour se raccorder aux communes voisines et à la campagne environnante, soit un par kilomètre. La route nationale est plus perméable que l’autoroute mais reste une barrière que vient doubler la voie ferrée qui limite drastiquement les chemins vers le Clain. Ces coupures favorisent une multipolarisation des communes. Beaumont-St-Cyr en est un exemple éloquent : deux communes à l’origine, de part et d’autre du Clain, déjà constituées de hameaux. Les infrastructures, autoroute, nationale et voie ferrée, renforcées par la topographie du versant ont limité le nombre de liaisons inter-quartiers et renforcé la polarisation. Selon leur situation, les pôles se spécialisent, secteur résidentiel en périphérie des noyaux anciens, secteur d’activité près de la nationale et secteur de loisir près du Clain.

    Des châteaux au fil du Clain

    La vallée du Clain a accueilli de nombreux châteaux qui semblent s’égrener au fil de l’eau. Entre le château de Joussé, en amont et le château de Dissay à l’aval, on dénombre plus de 20 châteaux dont plusieurs entourés de parcs. Certains sont proches d’un village, sans doute à l’origine du village, comme à Joussé, Sommières, Vivonne (château disparu), Poitiers, Dissay … D’autres se sont établis à l’écart, comme le château de Vayres à St-Georges-les-Baillargeaux. Que l’on ne devine que les toitures derrière un parc touffu ou au contraire que la silhouette entière se dégage, ces édifices qui jalonnent la vallée, contribuent à la qualité des paysages bâtis.